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Une directive de l’Union européenne sur la conservation des données, qui devrait être appliquée dans tous les États membres à compter de 2009, exige que tous les fournisseurs de services de télécoms conservent les données sur la destination, le sujet et la date d’envoi de tous vos courriers électroniques. Il est demandé aux fournisseurs de services internet européens de conserver non seulement les courriers électroniques, mais également les métadonnées d’une communication acheminée par leur réseau. Mais n’est-ce pas là une violation du droit fondamental à la vie privée, définie dans notre Déclaration universelle des droits de l’homme vieille de 60 ans? Cela ne va-t-il pas directement à l’encontre de la Charte des droits de l’internet d’APC? Les groupes associés à la communauté d’APC, les intellectuels et les collectifs de bidouilleurs radicaux se réuniront à Budapest en septembre pour trouver un moyen de se sortir de la Forteresse Europe 2.0.

Les FSI alternatifs face à un choix difficile

Les FSI qui respectent l’éthique et offrent des services de courrier électronique et d’hébergement de site web auxquels leurs clients peuvent faire confiance se sont toujours distingués par leurs mesures de protection de la vie privée des utilisateurs contre l’espionnage des gouvernements et des voleurs de données institutionnelles. Mais la dernière innovation législative de l’UE les place dans une situation intenable. Ils doivent choisir entre se soumettre au système de surveillance étatique – en compilant des fichiers sur leurs utilisateurs et en les mettant à la disposition des autorités – ou faire face à des poursuites pénales s’ils ne respectent pas la loi.

S’ils n’ont que ces deux options, ils feraient aussi bien de fermer boutique, selon les critiques les plus sévères du nouveau projet législatif de l’Union européenne. C’est sans doute ce que préfèreraient les agents chargés de traquer les fauteurs de trouble et les voix dissidentes sur la scène politique européenne. Mais rien n’est tout noir ou blanc, ou si c’est le cas, il devient urgent d’ouvrir le spectre.

Les Européens de l’Est en particulier n’ont pas besoin d’explication sur les effets de la surveillance étatique et la répression de l’expression des opinions personnelles et de la dissidence politique dans leur vie quotidienne. Des militants ont récemment dessiné le portrait du ministre de l’Intérieur de l’Allemagne, Wolfgang Schäuble, dans les rues de Berlin avec pour légende STASI 2.0. Schäuble a été l’instigateur d’une surveillance toujours plus intense des communications en ligne. Ses efforts ont été couronnés de succès avec l’approbation de la loi allemande sur la conservation des données qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2008. Stasi signifie Staatssicherheit, la police secrète de l’ancienne Allemagne de l’Est.

Pochoir du ministre Wolfgang Schäuble: Pochoir du ministre Wolfgang Schäuble. Licence: CreativeCommons Paternité-NonCommercial-Partage 3.0Pochoir du ministre Wolfgang Schäuble: Pochoir du ministre Wolfgang Schäuble. Licence: CreativeCommons Paternité-NonCommercial-Partage 3.0

Écraser la dissidence

La coopération et la coordination transfrontalières des États membres de l’UE en matière de surveillance électronique a déjà porté un grave coup à la lutte citoyenne pour la liberté, la justice et la paix, que ce soit le refus de l’accès à la Roumanie pour ceux qui voulaient se rendre à la manifestation contre l’OTAN à Bucarest ou les intimidations d‘écoblogueurs par les agents de police.

La répression et la surveillance gouvernementales ciblent parfois directement les fournisseurs de service, par exemple, l’écoute par le gouvernement italien du serveur du collectif Autistici/Inventati, pour tenter d’infiltrer un groupe solidaire des prisonniers appelé Anarchist Black Cross.

La saisie du serveur névralgique de Ahimsa d’Indymedia en Grande-Bretagne en est un autre exemple. La mesure qui a touché le FSI Rackspace a entraîné la fermeture de vingt sites web de publication ouverte utilisés par les journalistes citoyens et les organisateurs politiques.

Au moment où le mouvement altermondialiste s’essouffle, les États empiètent sur les libertés chèrement acquises en faisant appel à une rhétorique politique officielle fondée sur la peur et la haine. Or, cette rhétorique semble plaire à une partie de plus en plus importante de la population européenne.

L’alternative est bien vivante

Ce que l’on peut qualifier de « guerre pour la vie privée, la liberté d’expression et d’association » se livre sur plusieurs fronts simultanément.

Des avocats et des responsables de campagne contestent la directive de l’Union européenne au niveau international et devant les cours suprêmes nationales.

Les développeurs de logiciels et les administrateurs de serveurs créent et diffusent les outils et les astuces nécessaires à la résistance et à la protection des données.

Et surtout, les militants préparent des campagnes pour sensibiliser et mobiliser les internautes et partager les compétences. Plus il y aura de gens qui seront au courant de ce que l’on veut faire de leurs renseignements personnels sur internet et qui apprendront à réagir, plus la légitimité des plans de conservation des données de l’UE sera remise en question.

Manifestation spéciale: Un vent de fronde contre Bruxelles

Le membre d’APC Green Spider collabore avec le Centre for Media and Communications Studies de l’Université d’Europe centrale à Budapest et avec le collectif radical de technologie Nadir de Hambourg pour organiser la manifestation Data Retention on the Internet: Challenges for small, alternative and citizen-based Internet Service Providers (Conservation des données sur internet : Problèmes pour les petits fournisseurs de services alternatifs et citoyens) qui se déroulera du 18 au 22 septembre. Les membres de nombreux pays européens et non européens autres y assisteront pour apprendre, partager et résister collectivement.

Image : Pochoir du ministre de l’Intérieur de l’Allemagne, Wolfgang Schäuble, accompagné de l’acronyme de la police secrète de l’ancienne Allemagne de l’Est. Source: http://stasi20.net/