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Les logiciels libres sont une vraie solution aux problèmes de fracture numérique qu’engendre le sous-développement. En effet, il est désormais indéniable qu’ils ont, avec l’implication des femmes et leur prise en compte comme actrices incontournables, une part importante à jouer dans la création d’un environnement favorable à un développement équitable et durable. Pourtant, la Mauritanie, qui s’est très tôt engagée dans la voie de la maîtrise des TIC pour le développement social n’a rien prévu dans le domaine des logiciels libres, et encore moins dans l’insertion et l’implication des felles et des filles dans le domaine des TIC. Afin de véritablement réduire la fracture numérique, la participation égale des homes et des femmes est essentielle dans la société numérique mauritanienne.

Contexte

Les logiciels libres sont une vraie solution aux problèmes de fracture numérique qu’engendre le sous -développement. En effet, il est désormais indéniable qu’ils ont, avec l’implication des femmes et leur prise en compte comme actrices incontournables, une part importante à jouer dans la création d’un environnement favorable à un développement équitable et durable.
La Mauritanie, qui s’est très tôt engagée dans la voie de la maîtrise des technologies de l’information et de la communication (TIC) en vue d’en faire un outil privilégié au service du développement social, n’a pourtant rien prévu dans le domaine des logiciels libres, et encore moins dans l’insertion et implication des femmes et des filles dans le domaine des TIC. Le document national du « Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté » (CSLP)(a), qui aborde plusieurs thématiques, dont celles des TIC d’une part, et la promotion féminine d’autre part, ne cite aucunement l’articulation possible entre ces deux domaines. Ce cadre stratégique de lutte contre la pauvreté qui répond à un souci de bonne gouvernance a fait surgir beaucoup de paramètres transversaux et parfois nouveaux comme, celui de «Genre».

Or, placer le «Genre» » au centre du développement, c’est reconnaître que l’égalité de « Genre» » est une question de société et pas uniquement une question de femmes. C’est également attester de la légitimité du «Genre» » comme valeur fondamentale que devraient refléter les choix de développement et les pratiques institutionnelles. Dans ce sens, engager la réduction de la fracture numérique impose de promouvoir et d’encourager l’appropriation des TIC et la participation égale des hommes et des femmes dans la société numérique nationale.

Opportunités

Pour cela, la promotion et le renforcement, entre autres, du rôle des logiciels libres est essentielle. parce qu’ils peuvent favoriser la production de logiciels fiables adaptés et peu coûteux pour les utilisateurs de pays pauvres comme la Mauritanie (située au 152 rang des 177 pays les plus pauvres du monde)(b) et parce qu’ils peuvent participer à mieux traiter des questions de sécurité (virus, spam, hakers, piratages des données sur les serveurs officiels, des organes de la Sûreté nationale, de la Défense, etc…) et satisfaire de manière plus adaptée aux besoins de normes publiques et locales. Ces logiciels libres participent surtout à mieux propager la culture de la liberté d’expression et de communication qui est un droit humain fondamental et un pilier de la démocratie, car même s’il y a un semblant de liberté d’expression, elle est toujours fragile comme dans d’autres pays africains.

Malgré cela et les différentes recommandations sur la nécessité, voir l’urgence d’encourager et de financer le développement des logiciels libres en Mauritanie © et malgré l’organisation de nombreux ateliers sur l’informatique et les outils internet sous logiciels libres rien n’est, concrètement, fait ni par les pouvoirs publics ni par le secteur privé, ni même par l’université de Nouakchott (d) pour promouvoir et soutenir la création de tels logiciels. L’université de Nouakchott facilite pourtant l’accès à internet et aux ressources documentaires en ligne grâce aux différents cyber documents (cyberdocs) implantés un peu partout sur le campus universitaire avec un accès gratuit pour la famille estudiantine (étudiants, enseignants et chercheurs,..). Signalons que selon les sources de l’université, les filles ne représenteraient qu’environ 31% des utilisateurs de ces ressources en ligne et de cet accès gratuit à internet alors qu’elles représentent plus de 33% des 15.000 étudiants de cette unique université du pays (e).

Embûches

La plupart des formations qui sont organisées en Mauritanie dans le domaine des TIC, ne répondent pas toujours à un besoin réel exprimé par les bénéficiaires et/ou leurs structures. De plus, aucune mesure particulière n’est prise pour assurer une implication concrète des femmes dans ces formations, ce qui fait qu’elles représentent moins de 1% de ces bénéficiaires (f).
Pourtant, des formations comme la formation aux logiciels libres auraient, incontestablement, facilité l’insertion des jeunes filles et garçons par le biais de métiers nouveaux, pertinents et très sollicités (webmaster, infographie, montage, caméra, etc…) et répondu ainsi à un réel besoin du marché du travail.

Les rares ONG mauritaniennes qui oeuvrent dans ce domaine n’arrivent pas à satisfaire, seules les demandes dans le domaine de la formation. Pourtant si ces ONG, étaient à l’instar du secteur privé, au cadre de concertation mis en place par la tutelle, les programmes de formation auraient été plus efficaces et leurs capacités de formation plus grandes. Ces ONG auraient participé à mieux recenser/recadrer les besoins et auraient aussi contribué à l’exécution de ces programmes de formations. Même le pseudo-observatoire des TIC, ignore ces organisations et comme dans d’autres domaines, les actions publiques sont souvent et surtout politiciennes et n’ont, du coup, aucune portée durable.

La preuve en est que c’est l’ONG « Ntic et citoyenneté»(g) qui a initié et réalisé la première enquête étude sur la fracture numérique de Genre en Mauritanie, à la veille du SMSI, en 2005. Travaux dont l’atelier de validation des résultats ( h) a failli ne pas être inauguré officiellement, pour des questions qui demeurent encore très douteuses. Pourtant, cette étude pionnière ( i) va dégager des indicateurs sexospécifiques dans le domaine des TIC, ce qui est une première en Mauritanie.
De même que les centres d’accès communautaire créés çà et là par la tutelle ( j), n’ont pas survécu parce que les ONG qui oeuvrent dans ces domaines, n’ont pas été impliquées dans leur élaboration et leur mise en place. L’échec de réalisations comme le centre d’accès aux TIC au profit des femmes entrepreneures de Mauritanie, est regrettable d’autant plus qu’il pouvait efficacement servir ces femmes et de manière pérenne.

État des lieux

La libéralisation du secteur des TIC en 1999, la création d’un département spécifique à ces technologies, puis l’adoption d’une stratégie nationale des TIC et la création d’une agence nationale d’accès aux services de base (Télecom, TIC, Eau, Electricité, …), ensuite la création d’une autorité nationale de régulation (ARE) (k) et plus récemment, d’une haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (HAPA) (l), donnent l’impression d’un cadre institutionnel et juridique solide, ce qui n’est pas toujours le cas.
Par ailleurs, les nombreux bloggeurs mauritaniens et rares bloggeuses (ces dernières sont environ 2, 4 au grand maximum et préfèrent presque toutes garder l’anonymat)(m) sont entrain de se tailler une place de choix sur le Net et de contribuer, en médias citoyens, à la participation citoyenne, à la gestion de la chose publique, à la culture de la transparence, de la dénonciation, de la pression et de la solidarité mais aussi à toutes les libertés et même au libertinage (n)! L’hébergement externe offre plus d’opportunités, de confidentialité, de sécurité par rapport à l’hébergement interne assez sélectif (gestion du domaine internet encore sous le monopole de l’Administration voir de l’État) et souvent surveillé et donc censurable.

En Mauritanie, la plupart des serveurs internet (DNS, Mail et Web) sont administrés par des produits de l’ « Open Source » (o) et la plupart des cybercafés utilisent des logiciels libres pour leur gestion. Ces logiciels libres, sont souvent téléchargés à partir d’internet, copiés chez un collègue ou ramenés des ateliers régionaux et internationaux et permettent de réaliser des travaux dans des domaine tels que la bureautique, l’Internet, le multimédia, la création, les utilitaires, etc…. (GNU de type Unix, etc). Le piratage qui est une solution à l’impossibilité d’acheter les logiciels payants, pour beaucoup d’individus mais aussi d’institutions et sociétés privées, reste lui de mise même dans les institutions publiques et il n’y a pas de législation/juridiction nationale compétente pour lutter contre ce phénomène, même si l’autorité de régulation (ARE) et la haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (HAPA) essaient de combler le vide.

Maurifemme (p), devenu aujourd’hui une source d’informations incontournable sur tout ce qui a trait à la femme mauritanienne, a fait les frais du « piratage » de son site internet à plusieurs reprises. En effet, des journalistes, des bloggeurs, des chercheurs, entre autres, puisent très souvent dans ses ressources (documentaires, images…) pour illustrer le travail qu’ils publient ensuite sans aucune référence à la source. Les gestionnaires de ce site internet ont mené des actions en leur demande de mentionner, la source de leurs illustrations sans succès. Il y a peu d’informations sur la juridiction mauritanienne compétente qui pourrait protéger les droits d’auteur sur ce site internet.

Dans la « Stratégie nationale des TIC », aucune politique de développement de logiciels libres n’est mentionnée explicitement, ce qui limite les initiatives dans ce domaine et encourage l’exode des rares compétences toutes masculines (q), même si, par exemple, l’université de Nouakchott compte souvent des filles parmi ses lauréats en particulier dans le domaine de l’informatique. Ces lauréates font malheureusement, rarement, parler d’elles en créant ou en innovant. Au plus elles partent continuer leurs études à l’extérieur d’où elles reviennent pour travailler. Même au sein des associations des professionnelles de TIC comme Isoc-Mauritanie, les logiciels libres ne sont pas toujours le sujet favori autant pour les hommes que les quelques femmes qui en font partie. Elles ne sont d’ailleurs que 8,7% de ces professionnels des TIC, dans tout le pays ®. Quelques unes s’en sont distinguées, elles sont très peu nombreuses. Nous pouvons en citer deux, à titre d’exemple.

Femmes et TIC en Mauritanie

Deux informaticiennes en Mauritanie ont été formées à l’extérieur et ont accédé à de hautes fonctions de décision. Madame Fatimétou Mint Abdelmalek(s), devenue Maire du quartier résidentiel de la capitale et qui s’est distinguée par sa gestion de cette commune et par la force de sa personnalité dans un domaine, alors très monopolisé par les hommes, à savoir la politique citoyenne. Tandis que Madame Fatimétou Mint Mohamed Saleck(t), docteur es-mathématiques appliquées à l’informatique qui a été la première à occuper la tête du département ministériel dédié aux technologies nouvelles en Mauritanie et où elle est restée plusieurs années.

Il faut aussi mentionner l’apport d’une femme qui sans être informaticienne a été l’une des premières femmes à travailler avec les TIC et qui grâce à la formation continue dans le cadre de son travail, a été la première femme à réaliser du contenu web et à réaliser le plus important site internet consacré à la femme mauritanienne «Maurifemme », cité plus haut. Cet exemple illustre, la place des militantes africaines en général (u) dans des domaines et secteurs souvent jugés trop « techniques » qui, partant d’un besoin exprimé d’associer les femmes à la réalisation de contenu, mais aussi à leur intégration en tant que « ressources », vont créer, innover, démystifier et vulgariser des pratiques jusqu’ici réservées à une certaine « élite ».

En résumé, force est de reconnaître qu’en Mauritanie, rien n’est concrètement envisagé pour l’appropriation des logiciels libres et leur promotion comme outils de développement et d’accès au savoir, mais également comme outils de souveraineté et d’indépendance et que l’anarchie de la libéralisation du secteur de l’internet ne soit pas accompagné de plus de protection pour les droits d’auteurs.

Rappels et références documentaires

a) Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté :www.cslp.mr
b) Statistiques socioéconomiques tirées du site web : http://www.statistiques-mondiales.com/mauritanie.htm
c/q )« Vues d’ensemble des TIC et du Commerce Electronique en Mauritanie et points d’actions suggérés», SEMINAIRE-ATELIER 19-27 Octobre, NOUAKCHOT, CCI-SETN: http://www.mauritania.mr/passerelles/docs/pdf/e_commerce_TIC_en_Mauritan...
d) La seule université de Mauritanie (www.univ-nkc.mr) moins de 15.000 étudiants en 2009.
e) statistiques de la bibliothèque universitaire de Nouakchott (2008/2009)
f) Données recueillies auprès du personnel chargé de la formation au C.A.I : http://www.mr.refer.org/cnfweb, un des principaux fournisseurs de formations en TIC en Mauritanie.
g/m/r) Données recueillies auprès de l’ong « Ntic et citoyenneté » : www.maurifemme.mr/Ong/NTIC.html
/o) « Historique de l’état des lieux de l’Internet en Mauritanie», Zakaria OULD AMAR, PhD, Directeur associé ADAGE conseils & développement : http://74.125.77.132/search?q=cache:dRH2v54pu-4J:www.modernisation.gov.m...
h) « Etude sur la Fracture Numérique de Genre en Afrique francophone , données et indicateurs : Rapport National de la Mauritanie», juillet 2005 (http://www.maurifemme.mr/bibliovirtuelle.html)
i) « Sur la fracture numérique de genre en Afrique francophone » : www.famafrique.org/regentic/indifract/fracturenumeriquedegenre.pdf
j) Stratégie mauritanienne d’accès au TIC :http://www.itu.int/ITU-D/ict/mexico04/doc/doc/11_MRT_f.pdf
k) Autorité de régulation (www.are.mr)
l) Haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (www.hapa.mr)
n) Maureskland : http://maureskland.blogspot.com/2007/07/ou-sont-les-limites-de-la-dcence...
p) Maurifemme : www.maurifemme.mr, premier site web sur la femme mauritanienne dans sa diversité et premier site web initié et entièrement réalisé par une mauritanienne, en ligne depuis 2001.
s) Fatimétou Mint Abdelmaleck, Maire de Tevragh Zeina (Mauritanie) http://www.ani.mr/sys_journal/ImgJournal_26_01_2009_19_11_54.pdf
t) Fatimétou Mint Mohamed Saleck : http://www.itu.int/ITU-D/connect/africa/2007/media/plib/detail.asp?y=200...
u) Site de la femme africaine francophone : www.famafrique.org
v) Fatma Mint Elkory Oumrane (www.maurifemme.mr/fatma.html)