Comment les membres d’APC améliorent-ils le quotidien de leurs communautés ? Nous présentons dans cette chronique des récits qui soulignent l’impact et les changements opérés par nos membres, avec l’aide de subventions secondaires d’APC. Au Pakistan, Media Matters for Democracy (MMfD) travaille à la création de médias inclusifs, lutte contre la censure et défend les droits des femmes journalistes dans un contexte de plus en plus oppressif.
Comme son nom l’indique, Media Matters for Democracy (Les médias sont essentiels pour la démocratie) croit qu’une industrie médiatique ouverte aux technologies, diversifiée, inclusive et professionnelle est la clé d’une société progressiste et démocratique. C’est dans cet esprit que cette organisation pakistanaise travaille à la construction de médias dans le pays depuis 2016.
MMfD, dirigée par la journaliste Sadaf Khan, réalise des recherches sur les politiques et s’engage pour une meilleure réglementation des médias au Pakistan. L’organisation œuvre pour l’acceptation et l’intégration des technologies des médias numériques et pour la création d’initiatives durables de journalisme citoyen dans le pays. L’équipe vise à susciter le débat public, développer le journalisme numérique et le journalisme de données, et inclure les voix citoyennes.
Leur travail ne se fait pas sans difficulté, d’autant plus que l’organisation évolue dans un environnement médiatique décrit comme « délibérément oppressif », avec une hausse des attaques envers les journalistes, comme l’ont dénoncé Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits humains.
Combattre le cyberharcèlement envers les femmes journalistes
Avant de se joindre au programme de subventions secondaires d’APC, l’équipe de MMfD travaillait de façon bénévole. « Les subventions nous ont aidé·e·s à décoller et à travailler de manière plus ciblée. Nous avons réussi à faire face à des questions brûlantes comme le harcèlement en ligne des femmes journalistes », affirme Sadaf Khan en entrevue avec APC.
MMfD a beaucoup travaillé sur les questions entourant la sécurité des femmes journalistes et leur liberté d’expression au Pakistan. Au cours des dernières années, l’organisation a été témoin d’une escalade de discours haineux, d’incitations à la violence et aux abus sexuels explicites, particulièrement à l’encontre des femmes journalistes. À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes en 2021, MMfD a publié une déclaration appelant à la fin des attaques en ligne envers les femmes journalistes. Celle-ci faisait suite à une série de déclarations communes publiées entre août et septembre 2020 et appuyées par plus de 150 journalistes et une panoplie de réseaux et d’institutions.
Ces déclarations mettaient en lumière la tendance dominante à la violence numérique contre les femmes journalistes : une cyberviolence commise par des personnes de tous les partis politiques et de différentes institutions publiques et étatiques. MMfD appelait le gouvernement et les partis politiques « à améliorer la culture politique pour encourager un discours inclusif et tolérant au sein des partis politiques et dans les espaces publics […], à prendre position publiquement et immédiatement contre les abus envers les femmes journalistes et à se dissocier des individus et des comptes qui maltraitent les femmes journalistes. »
Publiée par MMfD en 2021, une étude sur les effets du cyberharcèlement envers les femmes journalistes révélait que 93 % d’entre elles s’abstenaient d’émettre leurs opinions personnelles en ligne. Les femmes journalistes interrogées dans le cadre de cette étude ont déclaré qu’elles étaient devenues prudentes lorsqu’elles publiaient sur les médias sociaux, au point de vérifier deux fois le texte de leurs tweets et de devoir se préparer aux réactions négatives potentielles. Le rapport révélait le lourd impact psychologique de cela sur les journalistes ciblées.
Création d’un observatoire des droits numériques
L’Observatoire des droits numériques (Digital Rights Monitor), qui a été mis sur pied par MMfD, a aussi eu un grand impact sur le paysage médiatique au Pakistan. Financé par le programme de subventions secondaires d’APC, c’est le premier (et jusqu’à présent le seul) site web dédié aux droits de l’internet d’un point de vue journalistique dans le pays. On y retrouve des reportages sur les droits numériques et les questions de gouvernance de l’internet au Pakistan ainsi qu’une collection de ressources et de publications connexes. Le projet vise à améliorer le traitement journalistique des questions de droits numériques en s’engageant auprès des médias et des journalistes.
« Avec la subvention d’APC, nous avons commencé l’Observatoire des droits numériques en tant que projet à petite échelle. Cela nous a été utile, car APC ne nous impose pas un agenda politique. APC ne s’est jamais ingéré dans notre travail sur le plan éditorial, ce que je craindrais de la part de toute entité étatique. En ce sens, APC était le soutien et le partenaire parfait pour lancer quelque chose comme ça », affirme Khan.
L’histoire mentionnée dans cet article est tirée du rapport « Poursuivre le dialogue : Leçons tirées des subventions secondaires d’APC ». Ce rapport présente les résultats d’entretiens et d’enquêtes auprès de notre équipe de travail ainsi que des membres et partenaires d’APC qui ont bénéficié d’un financement à travers notre programme principal de subventions secondaires, soutenu par l’Agence suédoise de coopération internationale au développement (Sida), ou de nos autres subventions secondaires proposées dans le cadre de projets d’APC.
Cette histoire vous a inspiré·e à semer les graines du changement dans votre communauté ? Racontez-nous votre histoire en nous écrivant à l’adresse suivante : communications@apc.org