En 2020 APC a mené des activités de plaidoyer stratégique et des interventions de renforcement des capacités en Afrique et en Asie pour lutter contre les atteintes aux droits et libertés fondamentales perpétuées dans le Sud global. Nous avons renforcé notre plaidoyer axé sur les normes de droits humains en Afrique, notamment en matière de politiques et de pratiques adoptées par les gouvernements au cours de la pandémie concernant les technologies. En Asie nous avons œuvré auprès des différents acteurs pour les sensibiliser à la question des normes en matière de droits humains et renforcer leurs capacités pour encourager leur application dans les politiques et la législation relative au discours de haine. APC a conservé sa place au sein des processus de politiques globales tels que le Conseil des droits de l’Homme (CDH) alors même que la pandémie réduisait et limitait la participation de la société civile.
Faire en sorte que les États et les entreprises de technologies reconnaissent leur responsabilité dans les violations aux droits
Au CDH, APC a œuvré pour la protection des données privées et de la liberté d’expression, tout en luttant contre le racisme et la persécution des minorités religieuses. Nous avons formé en ce sens des coalitions de plaidoyer avec des membres de la société civile et des délégations gouvernementales. Ainsi, le contenu de la résolution de l’ONU relative à la protection des données privées à l’ère du numérique, la liberté d’expression et la sécurité des journalistes reflète les priorités d’APC et de ses alliés, tandis que la Rapporteuse spéciale de l’ONU sur le racisme a inclus plusieurs points de notre soumission dans son rapport sur la discrimination raciale et les technologies du numérique.
Nous avons signalé le nombre croissant de violations aux droits humains perpétuées en Inde à l’encontre des minorités, suite aux attaques contre les musulmans dans ce pays. Aussi bien nos déclarations orales et écrites que nos conversations avec notamment les délégations de l’Union européenne, des États-Unis et du Royaume-Uni ont revêtu une grande importance du fait de la très faible représentation de l’Inde au CDH de 2019.
APC a appelé à prêter attention aux interruptions du service internet au Myanmar. Nous avons insisté sur le besoin de faire reconnaître les responsabilités, qui n’incombent pas uniquement à l’État mais également aux plateformes des médias sociaux tels que Facebook. Cette plateforme a en effet largement contribué à la diffusion des discours de haine à l’encontre des Rohingyas au Myanmar, conduisant à leur génocide en 2018.
APC a plaidé en faveur de l’adoption des principes de droits humains dans les entreprises qui gèrent les plateformes internet. APC a également élaboré un explicatif des politiques relatives à la responsabilité et à la reddition de comptes des plateformes dans lequel nous défendons l’application des lois internationales de droits humains en tant que normes de référence mondiale plutôt que d’appliquer les différentes lois nationales ou les intérêts privés. C’est ce qui permettra de veiller au respect de la liberté d’expression et d’autres droits sur ces plateformes.
En Amérique latine, APC a œuvré avec ses membres pour faire différer le passage d’une a loi relative à la désinformation qui menaçait les droits humains au Brésil. Nous avons également élaboré une série de critères de sélection pour nommer le Rapporteur spécial sur la liberté d’expression de l’Organisation des États Américains (OEA).
Dans le cadre de notre travail à niveau mondial pour la protection des défenseur·e·s des droits humains, APC a mené une campagne en faveur d'un procès équitable pour Ola Bini, expert en informatique et défenseur des droits humains en Équateur. Nous avons également continué à diffuser le cas du bloggeur Alaa Abdel Fattah, détenu arbitrairement en Égypte depuis septembre 2019.
Renforcer notre plaidoyer en faveur des normes et standards de droits humains en Afrique
La COVID-19 a engendré de nouvelles menaces envers les normes et standards des droits humains en vigueur. En Afrique, APC a élaboré un document d'opinion sur les incidences de la pandémie sur la jouissance des droits humains en ligne. Ce document se fonde sur le suivi réalisé par la Coalition de la Déclaration africaine des droits et libertés de l’internet (AfDec) qui porte sur les différentes mesures adoptées dans les États et d’autres acteurs pour répondre à la pandémie. Des membres de la Coalition AfDec et d’autres organisations de la société civile qui œuvrent en faveur des droits du numérique y émettent des recommandations dans cinq domaines fondamentaux : l’accès et l’accessibilité à l’internet, la régulation du contenu en ligne, le respect de la vie privée, la surveillance et la protection des données à caractère personnel, l’égalité de genre et les groupes marginalisés, et enfin, le droit à l’information.
Nous avons également chargé la Coalition AfDec de rédiger 19 articles pour analyser l'impact des politiques nationales et régionales en vigueur en matière d'internet, et celui des politiques adoptées à niveau national pour répondre à la pandémie, comme le confinement ou les politiques sanitaires impliquant l’utilisation de technologies du numérique. Ces articles ont été écrits par des chercheur·e·s, universitaires, journalistes et activistes des droits humains et des droits du numérique de toute la région.
APC a poursuivi son travail de plaidoyer en faveur d’une démarche axée sur les droits humains en matière de privacité et de protection des données en Afrique. Nous avons ainsi mené une recherche sur la législation relative à la protection des données dans sept pays : l’Éthiopie, l’Ouganda, le Kenya, la Tanzanie, l’Afrique du sud, la Namibie et le Nigéria. Nous avons également élaboré une trousse à outils pour la promotion de la protection des données privées, qui donne des informations fiables sur lesquelles les membres de la Coalition AfDec et les défenseur·e·s des droits humains peuvent se baser pour défendre les politiques, la législation et les réglementations relatives aux droits. Nous avons aussi organisé un atelier virtuel de quatre jours au Forum africain sur la gouvernance de l'internet (AfIGF), en partenariat avec le Centre des droits humains de l’Université de Pretoria. À cette occasion, la recherche menée à niveau régional a offert une analyse en détail des cadres légaux dans les sept pays, tandis que la trousse à outils permettait d’avoir une vue d’ensemble des normes légales en matière de droits sur la protection des données personnelles. Les différents acteurs ont ainsi eu accès à un ensemble d’outils pratiques pour formuler et mettre en place des cadres visant à protéger les données.
En Asie, lutter contre les violations par la sensibilisation et le renforcement des capacités
APC s’est employée à promouvoir une compréhension pratique des questions de protection des données privées, d’accès, de liberté d’expression et de genre lors de notre atelier sur les règles de l'internet intitulé "Internet Rules" de novembre dernier pour la région Asie du sud. Cet atelier s’adressait aux jeunes chercheur·e·s, aux journalistes, avocat·e·s et activistes des droits du numérique. Il visait à leur permettre de mieux comprendre et analyser les lois gouvernant les espaces en ligne et les technologies. Au cours de cet atelier, 26 participants et participantes originaires de sept pays différents ont examiné les incidences de la législation de la région en matière de TIC sur les droits humains en ligne. Notre base de données sur la législation s’est ainsi avérée un outil utile lors des tâches quotidiennes des participants et participantes.
En Asie du sud et du sud-est, APC a contribué à la création d’un récit pour contrer les discours de haine lors de nos cycles de conférences. Pour le premier cycle intitulé « Parler de haine : Présentation en trois parties sur la haine, la religion et le genre en Asie du sud et du sud-est », la Dr. V. Geetha, activiste féministe et écrivaine, a abordé le rôle des États de la région dans la mise en place de systèmes de haine envers les minorités dans la région. Ces conférences ont rassemblé des participant·e·s de toute la région et leur ont permis de trouver des points communs dans leurs vécus et dans les démarches employées pour lutter contre la haine. Il en est également ressorti une proposition pour que les gouvernements reconnaissent leur responsabilité dans l’encouragement des discours de haine en ligne et hors ligne.
Dans un même temps, une analyse de l'historique de la jurisprudence du Pakistan, de l’Inde, de l’Indonésie et d’autres pays du Sud global a permis de renforcer le plaidoyer d’APC contre les coupures d’internet dans la région. Ce rapport, qui offre un aperçu de la jurisprudence en matière de légalité des coupures d’internet dans le Sud global, porte également sur la question de plus en plus préoccupante des interruptions de service internet autorisées par les gouvernements, le plus souvent sous couvert de maintenir l’ordre public et de protéger les intérêts de la sécurité intérieure.
EngageMedia, un pilier pour les activistes des droits du numérique en Thaïlande
En 2020, au beau milieu des manifestations pour la démocratie menées par les jeunes en Thaïlande, le membre d’APC EngageMedia a apporté son soutien aux acteurs et actrices du changement. Il a organisé des événements, publié des guides et des articles et a contribué à assurer leur sécurité en ligne. L’organisation a publié un mémoire portant sur le contexte des manifestations et les différentes manières pour la société civile d’apporter son soutien aux activistes luttant pour la démocratie. La directrice pour la Thaïlande d’Amnesty International, Piyanut Kotsan, a également été invitée sur Pretty Good Podcast où elle a parlé des enjeux dérivant de ces manifestations en termes de droits humains et numériques. Les membres de la communauté Coconet ont organisé une rencontre solidaire où il a été émis un appel à la solidarité avec les activistes thaïlandais. Un article critiquant la censure dans les médias par les autorités thaïlandaises a été publié, ainsi qu’un appel pour défendre Rangsiman Rome, membre de Coconet, après son intervention sur l’enlèvement de l’activiste thaïlandais Wanchalearm Satsaksit. Darika Bamrungchok, directrice d’EngageMedia Digital Rights (Mekong) a été interviewée par Global Voices (sur le profilage biométrique des musulmans malais), ABC Radio Australia (sur l’activisme des jeunes contestataires) et FORUM-ASIA (sur la censure des dissidences). Elle a également été présentée dans le rapport 2020 de Mozilla sur la santé de l'internet. Dans les coulisses, EngageMedia a continué à proposer ses formations en sécurité numérique et offrir son soutien aux acteurs et actrices de la société civile qui œuvrent dans des contextes à haut risque. L’organisation a publié un manuel sur la sécurité numérique pendant les assemblées en Thaïlande et un guide sur l'hygiène en ligne largement diffusés parmi les groupes d’activistes thaïlandais.
EMPOWER a amélioré les directives concernant les immigrants en Malaisie
Le membre d’APC EMPOWER a contribué à la modification des lois discriminatoires relatives à la citoyenneté en Malaisie. Suite à la campagne d’information factuelle menée en collaboration avec Family Frontiers, le parlement a examiné les principales propositions de modification du cadre légal soumises en août et en novembre-décembre avec le soutien croissant des parlementaires. Ces modifications concernaient notamment la possibilité pour les non-citoyens de renouveler leurs visas ou d’en demander un sans quitter le pays, et la possibilité pour les conjoints et enfants non-citoyens de Malaisiens provenant de pays interdits de séjour d’entrer en Malaisie sous réserve d’approbation du service d’immigration. Celui-ci a également créé un portail de demandes en ligne destiné aux conjoints et enfants non-citoyens de Malaisiens.
Jinbonet a réagi à l’introduction d’IA dans les entretiens de travail en Corée du sud
Le réseau progressif coréen Jinbonet, membre d’APC, a plaidé pour une meilleure réglementation du gouvernement sur la question de l’intelligence artificielle (IA). Le réseau a axé son travail sur les programmes « entretiens de travail par IA » proposés par des entreprises privées et utilisés dans le secteur public. Malgré le développement de leur utilisation dans les institutions publiques, aucun principe ou procédure ne régule leur introduction et les institutions ne comprennent le plus souvent pas leur fonctionnement. Jinbonet a œuvré en ce sens en demandant l’intervention de la Commission pour la protection des informations personnelles au sujet des violations envers les données privées. Le réseau a également consolidé son travail en matière d’IA et a organisé une série de débats auprès de la société civile pour faire front commun et persuader le gouvernement de mieux réglementer ce secteur.
PROTEGE QV a examiné la conformité des lois relatives à la liberté d’association et de réunion en Afrique centrale par rapport aux directives de la Commission africaine sur les droits de la personne et des peuples
Le membre d’APC PROTEGE QV a contribué à l’apaisement des tensions concernant les incohérences entre les lois relatives à la liberté d’association et de réunion de deux pays d’Afrique centrale et les Directives de la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples. Ces incohérences juridiques sont source de nombreux conflits entre le gouvernement et les partis de l’opposition au Cameroun. Grâce au soutien de l’International Center for Not-for-Profit Law (ICNL), PROTEGE QV a mené une recherche portant sur le cadre législatif au Cameroun et en République démocratique du Congo, avant d’organiser des discussions avec des délégués du gouvernement, de la société civile et des médias, pour examiner les manières de réduire ces incohérences. Les parties prenantes ont accueilli favorablement le guide de référence de 92 pages et le document d’orientation qui leur ont été présentés, qui résumaient avec concision les informations, les apprentissages et les recommandations ressortant de la recherche réalisée.