En l’absence de transparence gouvernementale sur la gestion de l’état d’urgence, de l’absence de contrôle parlementaire par l’Assemblée Nationale et des limites du contrôle juridictionnel, ce régime d’exception, qui a été instauré pour lutter contre la COVID-19, a suscité légitimement des préoccupations sur les droits numériques au Sénégal.
Cette étude vise à faire l’inventaire des dérapages et erreurs de ce dispositif qui place le Sénégal hors du droit commun, ensuite, procéder à l’analyse des données afin d’en avoir une vue globale qui puisse permettre d’informer le public sur la réalité de l’état d’urgence et enfin faire des recommandations ayant vocation de garantir le respect des droits numériques.
La méthodologie regroupe la revue de la littérature sur les engagements internationaux du Sénégal en matière de droits numériques, une collecte de données par une recherche en ligne et un appel en ligne aux citoyens pour des témoignages.
Les résultats ont montré qu’aucune mesure n’a été prise par le Gouvernement du Sénégal visant à restreindre les droits numériques. Cependant, il y a eu des atteintes à la liberté d’expression en ligne avec l’arrestation de deux personnes pour discours incendiaire sur les réseaux sociaux.
En conclusion, il n’a pas été constaté, dans la mise en œuvre de l’état d’urgence, d’impacts négatifs sur les droits numériques, excepté sur la liberté d’expression. Néanmoins, des préoccupations existent sur le droit d’accès à l’information, le respect du droit à la vie privée et la protection des données à caractère personnel.
En effet, il a été constaté un manque de transparence du Gouvernement dans la gestion de l’état d’urgence et surtout sur les outils de surveillance numérique tel que le traçage numérique. Cette situation appelle à nouveau la nécessité d’une loi sur le droit d’accès à l’information et un renforcement de la protection des données à caractère personnel.
Enfin, l’évaluation du cadre juridique et réglementaire en cours au Sénégal depuis 2016, révèle que le gouvernement n’a pris aucune mesure concrète pour mettre en œuvre ses engagements sur la liberté d’expression, le Droit à l’information, le Droit de se réunir, de d’association et de manifester, depuis le 2e cycle de l’Examen Périodique Universel (EPU) d’octobre 2013. Pire encore, des lois contenant des dispositions tendant à remettre en cause ces droits ont été promulguées.
L’étude propose, ainsi, des recommandations visant à renforcer la protection des droits numériques au Sénégal.
Ce document est le fruit d’un travail de recherche conduit à ASUTIC avec l’appui du réseau AFDEC (Coalition de la Déclaration africaine des droits et libertés de l’internet) dans le cadre du « Rapid Response Grant ».