Tandis que le nombre d’internautes en Afrique augmente, les pays travaillent avec la communauté internationale afin de régler la question de l’infrastructure en Afrique Centrale. C’est ce qui est ressorti de l’exposé de Pauline Tsafak Doumessi, experte en économie et finances des télécommunications auprès du Ministère des postes et télécommunications au Cameroun, qui a eu lieu ce mercredi 30 mai au Forum sur la gouvernance de l’internet de l’Afrique Centrale.
Elle a expliqué les questions relatives à l’infrastructure sous-régionale, notamment les câbles SAT-3, EASSy opérationnels en 2009, le WACS et ACE qui seront opérationnels en 2012.Elle a expliqué que le modèle de gestion de ce câble peut être libre ou exclusif à l’ État, pour le Cameroun il est exclusif à l’État qui ensuite peut prendre des partenaires.
La nécessité de développer les réseaux transnationaux à l’intérieur des territoires de la sous–région a été relevée et une interconnexion entre pays de l’Afrique Centrale est prévue dans les prochaines années.
Intervenant sur le projet Central Africa Backbone (CAB), Pierre Sonfack, son Coordonnateur au Cameroun a justifié la nécessité de disposer d’une infrastructure à haut débit. « Ce projet sous-régional, né de la volonté des Chefs d’Etat de l’Afrique centrale en respectant la cohérence de l’intégration régionale, encourage l’accès ouvert, et le partenariat public privé, et va développer les marchés de vente en gros ». Il a jouté que « l’objectif principal est de contribuer à l’augmentation effective de la connectivité dans la zone et à l’accroissement de l’utilisation des services régionaux large bande, et la réduction des couts des services de télécommunications dans la sous-région ».
Une population d’internautes en pleine croissance
Des chiffres qui ont été cités montrent que le nombre d’utilisateurs d’internet en Afrique est en en pleine croissance. « L’Union Internationale des Télécommunications (UIT) estime qu’il y a à présent plus 2 milliards d’utilisateurs, seulement 1,2 milliards se trouvent dans les pays développés. En 2010 en Afrique, il y a 77 millions d’utilisateurs soit 9, 6% de la population. 29 millions de personnes en Afrique sont abonnés à des services d’internet à haut début sur mobile » a-t-elle cité. Ainsi, le mobile constitue l’avenir de l’internet en Afrique.
Une faible coopération des opérateurs en matière de collecte de statistiques sur l’internet a été notée, c’est le cas du Cameroun. Il y a près de « 1 million d’abonnés à l’internet ; mais un nombre d’utilisateurs importants qu’on ne connait pas car on peut avoir des enquêtes périodiques sur ce nombre » a expliqué Pauline.
Sur les stratégies de réduction du coût de l’accès à l’internet
Concernant les solutions qui permettraient de réduire les coûts, Pauline Tsafak Doumessi a parlé de « la création des points d’échange internet nationaux et internationaux (26 points d’échanges en Afrique) dans 20 pays » et des démarches sont en cours dans d’autres pays. Selon elle, « le Point d’échange internet permet de concentrer le trafic local ; la baisse du coût de la connectivité, la réduction du temps de latence, l’économie de la bande passante internationale. Cette solution n’est rationnelle que s’il y a des contenus nationaux et sous régionaux à échanger ».
« Il faut le faire au niveau africain, afin que le volume africain soit important et négocier le transit et ce sont les pays en voie de développement qui paient le transit, or il est possible de négocier le partage de coût » a-t-elle précisé.
La multiplicité de câbles sous-marins pourrait réduire les coûts d’accès qui demeurent quelque peu élevés. Cependant, les tarifs d’accès a ces câbles sont souvent exploités en monopole. Et certaines informations sur les coûts nécessaires pour orienter la décision ne sont toujours pas disponibles.
Citant l’exemple du Cameroun, Pauline a relevé « une connexion internet coûte en moyenne 1952 Dollars US par mégabit par mois, soit près de 20 fois le revenu moyen par habitant, malgré le SAT- 3 qui avait fait baisse le cout à 70% ».
Parmi les stratégies d’appropriation et de réduction de couts d’accès à l’internet, il faudrait citer : le développement de l’infrastructure de télécommunications à large bande ; la création des points d’échange internet ; la négociation des accords du transit ; la construction des points d’atterrissement et l’ouverture à la concurrence des câbles sous-marins ; l’assurance de la transparence à l’accès aux différentes portions de l’infrastructure non soumises à la concurrence ; et l’installation de serveurs pour héberger les contenus locaux ; entre autres.
Assurément, la réduction du coût d’accès à l’internet aurait aussi une influence positive sur la capacité de mettre en œuvre le e –gouvernement, et les services aux citoyens dans les différents pays de la sous-région.
Un environnement favorable au secteur des TIC
Pour le Coordonnateur du projet CAB au Cameroun, Pierre Sonfack « il faudrait encourager un environnement sectoriel favorable, l’intégration des marchés au niveau régional, renforcer le cadre réglementaire a niveau pays, et soutenir la libéralisation du secteur et combler les lacunes en connectivité ».
« Au Cameroun les activités menées par le projet CAB sont : l’assistance au gouvernement pour l’aménagement du cadre légal et réglementaire (terminé) , la réalisation d’une étude sur les points d’échange internet, l’assistance technique dans la gestion des fréquences, le renforcement des capacités des parties prenantes, et la promotion des lois promulguées sur les communications électroniques, sur la protection des consommateurs et la cyber sécurité ; et la réalisation d’un étude sur la conception des outils pour la gestion du marché de gros », entre autres, a cité le Coordonnateur de ce projet.
Y aller trop vite ou aller en toute connaissance de cause ?
Après avoir reçues ces informations, les participants ont posé des questions relatives au câbles-sous marins. Le modèle de l’opérateur unique a été critiqué ; « on bloque le développement, la base est la connectivité. C’est le même problème avec les services d’électricité et d’eau », s’est exprimé un participant.
Un autre a relevé le besoin de « ne pas aller trop vite car en Europe, c’est la dette, pas trop de business. Pourquoi les opérateurs ne construisent pas les lignes fixes mais préfèrent le mobile car moins coûteux ; mais est ce meilleur ? »
En réponse aux questions le Coordonnateur du projet CAB au Cameroun a expliqué que La gestion fibre optique doit avoir le concours de l’Etat afin qu’elle ne soit pas utilisée juste pour les besoins de l’exploitation. « Il y a une politique de séparation des opérateurs de l’infrastructure et des services, tels qu’au Tchad et au Cameroun cela évolue. L’opérateur historique porte le projet, mais l’accès à l’infrastructure est régulé. Le processus d’aménagement du cadre légal est déjà mené ainsi que l’étude de reformes de l’opérateur historique CAMTEL » a-t-il ajouté. Ces actions sont aussi menées dans les autres pays tels que le Congo, la RCA, le Gabon et la Guinée équatoriale.
En résumé, ce panel a éclairé les participants sur l’engouement des Etats et des bailleurs de fonds à investir dans l’infrastructure, la réforme sur le cadre réglementaire et les stratégies de réduction des coûts d’accès avec la multiplicité des câbles-sous marins et la concurrence. Un meilleur accès ne fera qu’augmenter le nombre d’internautes et de contribuer à l’intégration sous-régionale. Les avancées de ces différents projets d’infrastructure sont donc vivement attendues par les citoyens.
Sylvie Niombo es la directrive de l’organisation membre d’APC, Azur développement, en République du Congo.